Première partie


EUX FORT RIENT

Dans la prison d'un regard
passionné
le coeur se prononce
dans la mouvance des mots
euphoriques
dérive sur les grandes eaux
fascinées
par des instants abandonnés
dans la voie lactée

hasta luego !

04.07.98

BLUFF

Bouillonnant
le sommeil touche à tout
se cramponne aux souvenirs
se cambre se déchaîne
sur un lit échevelé
par des rêves bluffeurs
sous les draps
en rafales
heurtent le coeur
engorgé

Que viennent les tendres pluies
apaiser la torréfaction de l'âme
en son essence
aromatique

20.06.98

CONFUSION

Tout confus
le soleil ne sait plus ce qu'il fait
il compte des vies
sur le dos des jeunes filles
les remplit d'aujourd'hui
que demain oubliera
sans chagrin
disparu dans le grain du temps

20.06.98

FIN DE CHAPITRE

Dans la braise
l'amour se consume
d'une enfance à l'autre
au dernier chapitre
se rêve
se murmure
à bout de souffle
étranglé

12.06.98

IRONIQUEMENT

Étoilée
la mort enjoleuse
dans ses moments étourdissants
taquine le fol esprit
voué à l'inertie

rions en choeur
mes soeurs
buvons le vin grisant
grisé gris
de nos mortelles ferveurs
emprisonnées
dans la vie de l'autre
venue étonner
les instants
que nul chagrin
ne peut altérer

à l'heure des dissidences s'ajoutent
quelques caresses errantes
sur vos matins dévêtus

09.06.98

TITRE OUBLIÉ

Je songe au titre d'un poème
quand il nous somme
d'y voir dans la suie
des êtres
des îles
à plat-ventre sur la terre chaude
ennivrée par les départs
continus

09.06.98

ROUTINE DANS LES BOTTINES

Des aiguilles
dans les bottes mignonnes du présent
force la routine
du jamais vu
à biffer sur des formulaires inutiles
se retrouvent dans le foin
parmi des bisous sympathiques
aux adresses mentionnées
au bas de la page

dure la vie et ses chimères
mastiquées par des cerveaux
délirants

08.06.98

À MÊME LA VIE LE POÈME

C'est dans le vif du poème
que se répand la vie
sous toutes ses coutures
vient dire
je craque de toutes parts
je m'éclate sur des mystères
qui retiennent mon souffle
éperdu de lumière
à travers le sombre des désirs
spontanés

07.05.98

HEURES SOUMISES

Quand le poème s'enlise
dans les sables mouvants
d'une contrée douloureuse
un rêve violacé se dessine
désordonné
agenouillé
déplié par la tendresse
au sein des heures soumises

Il est tard
J'ai faim
Suis pas triste
Suis pas gaie
Juste là
teintée rouge
dans le couchant du soleil

02.05.98

PRESSOIR

Voyage fantastique
d'une âme compressée
par tous les passés
inscrits dans une seule mémoire
mémoire des sens
accourue vers le langoureux
l'inédit
une cavale de sentiments
de jouissances
compilés dans une petite valise
noire
laissée au seuil d'un impossible repos
du coeur pressé à froid
noble substance bue
dans la vastitude des oublis

25.04.98

FUYANCE

À l'aube
le gris enserre toujours
nos heures lointaines
devant un soleil rouge
et bohème
reparti invoquer
au coeur de la pierre
d'autres matins gris

laissons passer les nuits mouillées
quand les soirs se tordent de rire
ne restera qu'un poème
un sourire oublié dans un cri

09.04.98

SECRÈTEMENT

Y a des secrets qui m'crèvent
se parlent tout haut
se crient tout bas
devant soleil et lune
venus chanter l'amour
râpé dans le calice d'une fleur
ce lys candide
et vierge
toujours debout sur la rive
à regarder passer les rêves
emportés sur la rivière
d'une peine vivace
ennoblie

19.04.98

BROUILLARD

Je suis le soir
tu es le matin
soir d'un destin
qu'un matin désapprouve
quand se cherchent nos ressemblances
à travers les sentiers brumeux
des accomplissements
toujours renouvelés

09.04.98

MILLE GESTES

Chaussés de soleil
les vents doux nous promènent
sur des flottements de mots inachevés
délaissés par un hiver
que des gestes ont abandonnés
dans un jardin frileux
prêt à éclore en mille feux
sur l'âme esseulée

avril 98

PRISE REPRISE

Rendez-moi l'amitié
que j'aille crever sur les dunes du rêve
à mon tour que j'aille planter des fleurs
dans un jardin parfumé de roses
éternelles
un jardin sur une planète naine
planète de tendresses odorantes
chargée du poids des amours confinées
Retenez-moi des sombres envolées
joueuses de tours
joueuses tout court
que le temps vient ronger
au coeur d'un instant en équilibre

Pour une dernière fois
avant de m'en aller
j'aimerais connaître encore
le sort réservé à la naïveté
avant de rejoindre
ce fantôme de mon existence
encolorée
endolorie

31.03.98

JACHÈRE

Combien de temps
faudra t-il encore
pour taire ces orages d'images
toujours emportées
en vers
face contre terre
s'imagine des mondes modulés
à la fréquence des ailleurs en jachère
s'imagine des plages
de couleurs
de lumière
où se reposer un peu
où reprendre le souffle
quand l'âme suffoque
d'infinis

Combien de temps
la durée
Combien de temps
la vie

07.04.98

ENFILADE

J'ai la tête pleine
le coeur déborde
de poèmes en équilibre
sur la pointe des pieds
font des pas de deux
avant d'aller se coucher
sur ma page
me rêvent démesurée
me rêvent en queue de chemise
en noir et blanc
s'amusent dans mon jardin
enfilés sur mes heures
s'étalent de long en large
sur des montagnes d'images
endimanchées
sur ma route s'enroulent
autour d'un pur hasard
se balancent
au bout d'un nez
très rapproché
le mien

17.03.98

EN QUELQUES MOTS

Il se mijote des mots
dans le mou de l'histoire
se cherchent
s'empilent
se rejoignent à la même adresse
font une pause
au coin de l'oeil d'un enfant
reprennent le chemin
qui traverse le couloir musical
de l'intime
à la rencontre d'un regard
toujours attendu
jamais entrevu
inspirent des curiosités
à l'âme intrépide
fête ininterrompue d'un espoir
conservé
dans le formol du temps

18.03.98


© Éditions En Marge et Huguette Bertrand
Dépôt légal / 2000
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
ISBN 2-921818-19-1 - Tous droits réservés

 

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